Le barème des dommages intérêts pour licenciement abusif, par Maître François-Xavier BERNARD
- 30 octobre 2017
- Par admin
- Dans Droit du travail et Conseil des prud'hommes
Le nouveau barème des dommages intérêts pour licenciement abusif, par Maître François-Xavier BERNARD
Ce barème instaure un plancher d’un mois de salaire brut, pour une année d’ancienneté, et de trois mois de salaire brut à compter de deux ans d’ancienneté.
Le plafond varie lui aussi en fonction de l’ancienneté : d’un mois pour une année d’ancienneté, à vingt mois pour trente ans d’ancienneté et plus.
Dans une entreprise de moins de onze salariés, le plancher est toutefois de trois mois à compter de dix ans d’ancienneté, contre deux ans d’ancienneté dans les entreprises plus importantes. L 1235-3 du code du travail
Le barème s’impose aux juges, pour tous les licenciements notifiés à compter du 24 septembre 2017 : il est à mon sens en règle générale inférieur à ce que les salariés pouvaient escompter devant les conseils de prud’hommes avec un dossier bien monté.
Ce barème s’impose également en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail ou de prise d’acte du contrat de travail judiciairement requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse (article L 1235-3-2 du code du travail )
En contrepartie, l’indemnité légale de licenciement a été augmentée, comme expliqué dans un article précédent (Les indemnités légales de licenciement revues à la hausse ) : c’est en réalité reprendre de la main droite ce qu’on donne de la main gauche, puisque l’article 1235-3 du code du travail dispose que pour déterminer le montant des dommages intérêts, le juge peut justement tenir compte des indemnités de licenciement versées au salarié…
On ne peut donc exclure que désormais, un cadre licencié après vingt ans d’ancienneté (qui a donc touché une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement d’au moins cinq mois de salaire), et qui a retrouvé immédiatement un emploi au salaire comparable à l’ancien, ne se voie octroyer en justice que trois mois de salaire, si son licenciement est abusif (contre au moins six mois précédemment, et en pratique, souvent plus) si son licenciement est abusif…
Ce barème devrait contribuer à la diminution du contentieux prud’homal. Cette limitation est l’un des buts des ordonnances Macron.
Toutefois, lorsque le licenciement est jugé nul, le barème est écarté si le salarié ne demande pas sa réintégration ou si celle-ci est impossible : le salarié a droit à des dommages intérêts d’au moins six mois de salaire brut, sans que le plafond dudit barème soit applicable. Les cas de nullité visés sont ceux liés à ( article L 1235-3-1 du code du travail) :
-la violation d’une liberté fondamentale, entendue comme une atteinte au droit de grève, au droit d’ester en justice ou à la liberté syndicale selon le rapport joint à l’ordonnance ;
-des faits de harcèlement moral ou sexuel ;
-un licenciement discriminatoire ;
-un licenciement faisant suite à l’action en justice du salarié en matière d’égalité professionnelle ;
-un licenciement faisant suite à la dénonciation par le salarié de crimes et délits ;
-l’exercice d’un mandat par un salarié protégé ;
-la protection attachée au congé de maternité ou de paternité et au statut de victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
On peut donc raisonnablement supposer que si le contentieux du licenciement dit abusif sera endigué par la réforme, le contentieux des nullités augmentera quant à lui. La pratique s’engouffre toujours dans la brèche.
François-Xavier BERNARD, avocat au barreau de DIJON.