Nullité du bail rural. Contrôle des structures. Par Maître François-Xavier BERNARD, avocat au barreau de DIJON.
- 1 décembre 2023
- Par zenon
- Dans Droit rural
Civ. 3ème, 26 octobre 2023. n° 21-24231
Par cet arrêt, la Cour de cassation apporte deux précisions sur les conditions de mise en œuvre de l’action en nullité ouverte par l’article L. 331-6 du code rural et de la pêche maritime.
L’article L 331-6 du Code rural dispose que
, « le refus définitif de l’autorisation ou le fait de ne pas avoir présenté la demande d’autorisation exigée (…) dans le délai imparti par l’autorité administrative en application du premier alinéa de l’article L. 331-7 [du code rural et de la pêche maritime] emporte la nullité du bail que le préfet du département dans lequel se trouve le bien objet du bail, le bailleur ou la société d’aménagement foncier et d’établissement rural, lorsqu’elle exerce son droit de préemption, peut faire prononcer par le tribunal paritaire des baux ruraux »
L’autorisation d’exploiter (ce qu’on désigne par l’expression contrôle des structures) est donc une condition de validité du bail rural dont l’absence fait obstacle à la formation.
Ainsi, le bailleur peut saisir le tribunal paritaire des baux ruraux d’une action en nullité du bail consenti au fermier qui s’est vu refuser l’autorisation d’exploiter par l’administration.
Mais dans quel délai ?
La Cour de cassation retient l’application du délai de prescription quinquennal de droit commun.
Cependant, la Cour de cassation rappelle que l’exercice de l’action en nullité du bail rural, ouverte par l’article L. 331-6 du code rural et de la pêche maritime, suppose, dans tous les cas, que le locataire contrevenant au contrôle des structures ait été mis en demeure et que le délai imparti soit expiré (3e Civ., 31 octobre 2007, pourvoi n° 06-19.350, Bull. 2007, III, n° 186 ; 3e Civ., 12 décembre 2012, pourvoi n° 11-24.384, Bull. 2012, III, n° 184).
Le point de départ de la prescription court ainsi à compter du jour où le titulaire de l’action a connu ou aurait dû avoir connaissance de l’expiration du délai imparti au locataire, dans la mise en demeure, pour régulariser sa situation.
Et si l’administration n’a pas enjoint au fermier de faire le nécessaire ?
Le bailleur ne peut agir en nullité, il lui revient d’enjoindre à l’administration de faire le nécessaire, au besoin en saisissant la juridiction administrative….
Reste aussi l’hypothèse dans laquelle fermier a lui-même déféré le devant la juridiction administrative le refus qu’il a essuyé.
A notre sens, le refus n’est pas alors définitif (même si le recours administratif n’est pas suspensif en principe) et le point de départ de la prescription pourrait être alors repoussé au jour où le jugement (ou l’arrêt) sera devenu définitif.
Mais en corollaire, le tribunal paritaire des baux ruraux ne pourra statuer sur la nullité tant que la juridiction administrative n’aura pas elle-même tranché (Civ. 3ème, 13 juillet 2010, n° 09-16.598), ce qui entraînera un sursis à statuer qui pourra durer plusieurs années, au regard de la longueur des procédures administratives.
Pour remédier à cet inconvénient, il est bon de prévoir, dans le bail rural, une condition résolutoire en vertu de laquelle le bail sera anéanti si le fermier n’a pas obtenu l’autorisation définitive d’exploiter dans un délai déterminé.
François-Xavier BERNARD