La reprise sexennale du bail rural renouvelé : une faculté méconnue du bailleur
- 8 juin 2021
- Par zenon
- Dans Droit rural
François-Xavier BERNARD, avocat à Dijon, avocat en droit rural
Six ans, c’est moins long que neuf ans !
On le sait, la reprise peut être exercée par le bailleur, soit pour lui-même, soit au profit de son conjoint, de son partenaire de PACS ou de ses descendants. (c’est l’article L411.58 alinéa 1er du code rural)
Toutefois, cette reprise ne peut intervenir qu’à la fin du bail de neuf ans, par le biais d’un congé signifié deux ans au moins avant l’échéance.
Mais il est possible d’exercer le droit de reprise en cours du bail, sans attendre un terme qui peut être lointain : c’et le mécanisme de la reprise sexennale, de l’article L 411-6 alinéa 1er du code rural.
Par dérogation à l’article précédent, au moment du renouvellement du bail, le preneur ne peut refuser l’introduction d’une clause de reprise à la fin de la sixième année suivant ce renouvellement au profit du conjoint, du partenaire d’un pacte civil de solidarité ou d’un ou de plusieurs descendants majeurs ou mineurs émancipés, qui devront exploiter personnellement dans les conditions fixées à l’article L. 411-59.
Des conditions sont requises :
- Le bail doit avoir été renouvelé une fois au moins (la faculté ne peut être exercée pendant le premier bail)
- Curieusement, la reprise ne peut pas être exercée au profit du bailleur, mais seulement de son conjoint, son partenaire ou ses descendants (allez savoir pourquoi…)
Comment se passent les choses en pratique ?
Soit le bail rural comporte ab initio la mention de la reprise sexennale (ce qui n’est pas souvent le cas…)
Soit le bail est muet (ou verbal…) : dans ce cas de figure, dès que le bail se renouvelle, le bailleur écrit à son fermier pour lui demander de rédiger un avenant au bail rural, qui reprendra cette clause de reprise.
Cette clause est de droit, donc le fermier ne pourra valablement s’y opposer.
Si le fermier refuse, il appartiendra au bailleur de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux, qui contraindra le fermier à accepter la clause de reprise sexennale.
Et si le bailleur a laissé passer le renouvellement du bail sans demander l’introduction de la clause de reprise sexennale dans le bail ?
La jurisprudence est très accommodante : l’article L 411-6 précité n’est soumis à aucun délai. (Civ. 3 ème, 13 mars 1985)
Autrement dit, le bailleur peut demander l’introduction de la clause un an ou même plusieurs années après le renouvellement du bail !
Il pourra même demander l’introduction de la clause lors d’un deuxième ou troisième renouvellement du bail, s’il a oublié de le faire plus tôt.
Mais bien sûr, attention à la rédaction du congé pour reprise (qui relève d’un autre débat).
François-Xavier BERNARD, avocat à Dijon, avocat en droit rural